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    Au service des personnes fragiles

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    Les robots seront-ils essentiels à la sauvegarde de l'autonomie des personnes fragiles ? Probablement, mais pour ce faire, un engin humanoïde multitâche serait moins efficace qu'une flottille d'appareils spécifiques travaillant en équipe. Même un robot aspirateur peut jouer un rôle important !

    Une première version de cet article est parue dans le dossier n°87 Les robots en quête d’humanité de la revue Pour la Science, numéro de avril/juin 2015.

    Selon l’INSEE, la France de 2035 comptera 20,9 millions de personnes âgées de plus de 60 ans (soit un tiers de la population totale) contre 12,6 millions en 2005. Cet accroissement, qui correspond à une hausse de 66 % en 30 ans, traduira l’arrivée à ces âges des générations issues du baby-boom, nées entre 1946 et 1975. La France n’est pas un cas isolé. Selon certaines projections, en 2050, les plus de 65 ans représenteront 28 % de la population en Europe (contre 15 % en 2004), 22 % en Amérique du Nord (contre 12 %), 18 % en Asie (contre 7 %)… Une forte majorité de cette population souhaitera — et désire déjà — continuer à vivre dans son domicile, même avec une autonomie diminuée. Comment le lui permettre ?

    De l’usine au foyer

    L’effort public consacré à la compensation des pertes d’autonomie des personnes âgées était estimé en 2008 à près de 21 milliards d’euros. Ce budget ne fera qu’augmenter, ce qui posera certainement des problèmes d’équilibres sociaux. Il convient donc d’examiner comment des aides techniques appropriées pourraient limiter ces dépenses tout en apportant une meilleure sécurité. C’est dans ce contexte d’un mieux vivre que les robots d’assistance entrent en scène pour le bénéfice des personnes âgées ou handicapées, mais aussi, nous le verrons, celui d’autres publics. Examinons d’abord comment les robots sont passés de l’usine à nos foyers.
    Jusque dans les années 1990, la robotique se déployait surtout dans le domaine industriel où elle excluait, à de très rares exceptions, l’homme de son champ d’action. L’exemple typique est le robot manipulateur d’une usine, isolé matériellement de tout humain, souvent placé dans un enclos grillagé avec une seule porte dont l’ouverture déclenchait l’arrêt immédiat du robot. Cet isolement se justifiait par la dangerosité de l’engin ou du milieu où il évoluait.
    Cet état de fait a changé dans les années 2000 quand la robotique de service est apparue. Qu’est-ce qu’un robot de service ? C’est un robot qui opère de façon autonome, ou semi-autonome, pour fournir des services utiles au bien-être des humains ou au bon fonctionnement d’équipements, en excluant les opérations manufacturières. Cette robotique supprime donc la barrière entre le robot et l’homme. C’est ainsi qu’est apparu le robot médical, certes contrôlé par un humain, mais dont on utilise la grande dextérité, parfois supérieure à celle de l’opérateur, pour intervenir directement sur un autre humain.

    Y’a de la Roomba dans l’air

    Ce bouleversement se justifie partiellement par l’apparition d’une nouvelle informatique qui a rendu disponibles des ordinateurs de taille réduite, consommant peu d’énergie et que l’on peut facilement associer avec les capteurs et actionneurs des robots. Parallèlement, la diversité de ces derniers a explosé en même temps que les coûts ne cessaient de descendre. Par exemple, un microcontrôleur de type Arduino, à moins de 30 euros aujourd’hui, permet de contrôler six moteurs et une dizaine de capteurs. L’équivalent aurait coûté plusieurs milliers d’euros dans les années 1990. Reste la mécanique et les actionneurs, mais ils ont une influence relativement marginale sur le coût des robots de faible puissance.

    C’est ainsi que l’on a vu apparaître en 2002 une forme de robotique de service avec le premier robot aspirateur Roomba, de la société IRobot, qui offre des performances intéressantes à un prix abordable. Le cas d’IRobot est intéressant, car il est symptomatique de différents aspects de la robotique d’assistance. Cette société était initialement une petite start-up installée à la lisière d’un marché occupé par des géants industriels. En fait, un de ces mastodontes, Electrolux, avait lui aussi développé un robot aspirateur semblable à celui d’IRobot. La différence de succès s’est jouée sur les stratégies de vente. IRobot a choisi un prix de vente directement dérivé du coût de la machine, soit quelques centaines d’euros, alors que son concurrent a estimé que seuls les amateurs de gadgets high-tech allaient acheter le produit et être prêts à débourser plusieurs milliers d’euros. Résultats : Electrolux a vendu une poignée de ses robots, alors qu’IRobot en a vendu des millions…
    Dès que les coûts du matériel permettent d’envisager des robots bien au-delà du cadre purement industriel, militaire ou de celui des machines d’exception, tels les robots spatiaux, le marché devient colossal. La Japan Robotics Association a estimé qu’à l’horizon 2025, le marché de la robotique de service pèserait cinq fois plus que la robotique industrielle. Et la robotique d’assistance aux personnes fragiles, en particulier les seniors et les handicapés, pèsera lourd dans cet essor. Cependant, l’offre doit être adaptée.

    Pour identifier les besoins ainsi que les lignes directrices qui devaient guider nos développements, nous nous sommes entretenus pendant plus de deux années avec des individus concernés. Nous avons interrogé en premier chef les personnes âgées ou handicapées, mais aussi leurs associations et leurs aidants (famille, infirmière à domicile…), des personnes de maisons de retraite, des médecins, des responsables de collectivités territoriales et des assureurs.

    Parmi les priorités qui se sont dégagées, mentionnons l’assistance à la mobilité et la sécurité. Par exemple, un problème crucial est la chute : on estime qu’en France, chaque année, 10 000 personnes âgées meurent des suites directes d’une chute. C’est trois fois plus que le nombre de morts dus aux accidents de la route.

    Autres aspects essentiels, les relations sociales et le suivi médical. Les médecins se plaignent de ne pas disposer d’assez d’informations sur l’état de santé de leurs patients alors que leurs trajectoires de vie évoluent rapidement. Un suivi au plus près de la vie quotidienne leur permettrait notamment de détecter plus facilement des pathologies émergentes.
    Quant aux lignes directrices, il ressort de nos enquêtes que nous devons proposer des systèmes peu intrusifs, voire invisibles, qui ne se déploient qu’à la demande ou en cas d’urgence. Idéalement, les systèmes seront quasi autonomes et ne nécessiteront aucune intervention de la part du bénéficiaire.

    Les systèmes doivent s’adapter à l’utilisateur et à son environnement afin, sauf cas particulier, de ne pas modifier le cadre de vie. Une assistance ne signifie pas une substitution. En d’autres termes, le système doit trouver un compromis entre l’aide apportée et le maintien du niveau d’activité à son maximum. Une aide technique doit faciliter les relations sociales, pas les remplacer.
    Les interfaces de contrôle doivent être variées afin de répondre au mieux aux aptitudes physiques et cognitives des utilisateurs et à leur évolution dans le temps. De même, les individus bénéficiaires de l’assistance, ainsi que leur entourage (aidants, médecins…), doivent être mis très tôt dans la boucle de conception du système pour en faciliter l’acceptation.

    L’aspect économique est aussi important. Les dispositifs doivent être bon marché, faciles à installer et à entretenir. Ils doivent également être économes en énergie. Enfin, les données recueillies resteront impérativement confidentielles.

    Universel ou spécialisé ?

    Les options pour remplir ce cahier des charges se déclinent en deux extrêmes : un outil universel qui satisfait toutes les contraintes ou bien un ensemble d’aides techniques très spécialisées.
    Une partie de la recherche en robotique se concentre sur la première option, celle de l’outil universel, le plus souvent sous la forme d’un robot humanoïde. C’est un sujet d’étude très riche de par la complexité du robot à concevoir. Son physique anthropomorphe laisse imaginer qu’effectivement il sera adapté à la majorité des tâches d’assistance, dont celles liées aux relations sociales : les robots compagnons sont censés exhiber des émotions, comprendre celles des humains et réagir « intelligemment » pour adapter leur comportement. Ces rôles soulèvent la question des relations de l’homme avec les machines et de leur acceptation, les mécanismes de celle-ci étant parfois complexes et surprenants. On trouve sur Internet des vêtements et autres gadgets pour des robots aspirateurs (des cylindres plats) qui sont donc considérés bien plus que des machines !
    À l’inverse, on observe parfois un rejet immédiat, total et quasi irréversible de la machine. Par ailleurs, on peut se laisser abuser par certaines attitudes du robot : elles semblent très émotionnelles, mais elles sont en fait purement mécaniques et sans intelligence aucune. Les réactions du public lors des représentations de la pièce Robot de la danseuse et chorégraphe Blanca Li, où sont utilisés des robots Nao, suffisent à s’en convaincre.

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    Le robot Nao, un humanoïde de 57 cm de hauteur. Une telle machine est-elle la mieux indiquée pour prêter assistance aux personnes âgées ?
    © Inria / Photo H. Raguet

    Cependant, on peut opposer quelques objections de fond à l’utilisation d’humanoïdes pour l’assistance. D’abord, le prix peut être un frein. Le robot Nao coûte quelque 15 000 euros, cette somme augmentant très vite avec la taille du robot, jusqu’à atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros. Qui plus est, on ne peut guère espérer de baisse des prix significative, car ces robots sont élaborés avec des composants standards, produits en masse. Ces prix élevés se justifient par la complexité intrinsèque de l’humanoïde qui nécessite plusieurs dizaines d’actionneurs et de capteurs, ainsi qu’une informatique puissante. La physique est le second élément qui pénalise l’option humanoïde. Nous avons dit qu’une part importante de l’assistance consiste à faciliter la mobilité des personnes âgées. Or les lois de la mécanique indiquent que cette fonction requiert une énergie importante, d’autant plus que le rendement des robots humanoïdes est médiocre. Cette difficulté va de pair avec le problème de l’énergie. Pour l’illustrer, rappelons que Asimo, le célèbre robot de Honda, a une autonomie… d’une vingtaine de minutes ! En ce qui concerne les émotions, le message doit être clair. Dans l’état actuel des technologies, aucun robot n’est doté de la moindre caractéristique d’une intelligence (au sens commun du terme), même très modérée. Ce sont juste des machines qui, dans certains cas, peuvent avoir des performances supérieures à celle de l’homme, mais dont les capacités d’adaptation à une situation nouvelle restent très faibles. À moins d’une révolution fondamentale de l’informatique, la perspective de robots « intelligents » reste très lointaine.

    Au regard de ces inconvénients, la deuxième option semble plus réaliste. Elle consiste à réunir un ensemble de dispositifs d’aide efficaces dans un nombre limité d’actions et conçus pour collaborer pour des tâches plus complexes. De tels dispositifs existent déjà, mais leur conception souffre de certains manques.
    Prenons le cas des colliers de téléalarme : en cas de problème, par exemple une chute, l’individu appuie sur un bouton qui alerte les secours. Dans le principe, ce système est efficace, mais il est rarement demandé par la personne qui le porte. L’instigateur est plutôt la famille qui, avec des intentions louables, transmet tout de même un message très négatif au sujet. En conséquence, le dispositif est rarement porté (volontairement ou non), comme l’atteste le taux de retour du produit au bout d’un an, à savoir 85 %. De plus, on retrouve dans ces systèmes le modèle économique des robots aspirateurs d’Electrolux. Le prix n’obéit pas au modèle industriel (le coût de revient ici est faible), mais est plutôt indexé sur les capacités de financement des aidants ou des systèmes de sécurité sociale, ce qui conduit souvent à des prix incompatibles avec une diffusion de masse. Toutefois, on peut trouver des systèmes conçus en fonction des priorités et des lignes directrices qui ont été identifiées. Donnons quelques exemples.

    Un déambulateur connecté

    Pour l’aide à la mobilité, une solution souvent préconisée après l’apparition des premiers problèmes de motricité est le déambulateur, un appareil qui est de plus en plus accepté. Nous avons transformé la version classique de cet engin en une aide technique robotisée à fonctions multiples. Pour ce faire, nous avons placé un capteur dans chacune des roues arrière afin d’en mesurer la rotation. Un modèle mathématique aide à reconstituer la trajectoire du déambulateur, donc la marche de son utilisateur. Or les médecins estiment que la marche fournit des indications précieuses sur le statut fonctionnel et cognitif des personnes âgées. Ainsi, par une instrumentation simple, le déambulateur devient un outil de monitoring médical disponible en permanence et fournissant des informations objectives sur l’état de santé du sujet.

    Ajoutons maintenant un accéléromètre, un émetteur GSM, une liaison sans fil et un capteur qui repère la présence du sujet derrière le déambulateur. L’accéléromètre détecte les vitesses et les accélérations anormales, typiques d’une chute. Dans un tel cas, quand, en plus, le détecteur de présence ne « voit » plus l’utilisateur, on peut suspecter une chute et émettre une alerte via le GSM et vers les autres aides techniques du voisinage. Un GPS additionnel améliorerait l’alerte en indiquant l’endroit de la chute. Ce GPS aiderait aussi à naviguer dans un environnement inconnu. La prudence s’impose néanmoins, car des études cliniques ont montré que les utilisateurs n’apprécient pas les systèmes de navigation « autoritaires ». De fait, ces équipements peuvent donner le sentiment de dépouiller l’individu de son autonomie de décision.

    On peut concevoir la navigation autrement. L’accéléromètre renseigne aussi sur la pente du trottoir où circule l’utilisateur, sur la qualité du revêtement et détecte automatiquement les dépressions des trottoirs (les « bateaux »). Toutes ces informations sont géolocalisées grâce au GPS. Imaginons alors, dans une ville donnée, une flotte de déambulateurs dont les informations sont intégrées dans un système cartographique. Un utilisateur de déambulateur ou de fauteuil roulant ne connaissant pas la ville pourrait obtenir du système un itinéraire adapté à ses particularités, tel que « traverser les rues uniquement à des bateaux » ou « ne pas prendre des trottoirs trop pentus ».

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    Le déambulateur ANG (à gauche) a été équipé d’instruments (accéléromètre, émetteur GSM, GPS…) qui permettent de suivre les trajectoires. Par exemple, sur une distance de dix mètres en ligne droite, on se rend compte que celles des sujets âgés (figure de droite, courbes en bleu) oscillent plus que celles des individus jeunes (en rouge). Cet appareil aide aussi à cartographier un territoire, tel le site Inria basé à Sophia-Antipolis (voir schéma au milieu : la pente des trottoirs augmente du vert au rouge ; les points noirs sont les bateaux).
    © Inria / Photo C. Tourniaire – © Inria / HEPHAÏSTOS

    Ces principes ont été mis en application avec notre déambulateur ANG pour un surcoût modeste (voir la figure ci-dessus). Notons que cet appareil a une autonomie énergétique raisonnable (de l’ordre de quatre jours) et que nous comptons l’étendre en installant des dynamos dans les roues. Ainsi instrumenté, le classique déambulateur devient une aide technique pouvant assurer un support, un monitoring médical et augmenter la sécurité des utilisateurs. Toujours dans le domaine de la mobilité, nous avons réfléchi au problème des déplacements en intérieur. Nous avons placé dans le plafond de notre appartement témoin un robot de type particulier, un robot parallèle à câbles, nommé Marionet-Assist. Des treuils placés au plafond enroulent ou déroulent quatre câbles reliés à une plate-forme (voir la figure ci-dessous). Grâce à un contrôle approprié des longueurs des câbles, on déplace la plate-forme en n’importe quel point de la pièce. Ce robot peut soulever une personne placée dans un harnais ou bien l’aider à se déplacer quand elle s’accroche à la plate-forme. Le dispositif est discret : inutilisé, il peut disparaître dans le plafond. De plus, la plate-forme est équipée d’accéléromètres qui permettent d’analyser la marche de l’utilisateur. Simple à utiliser, le robot aide les individus les plus atteints à passer seuls de leur lit à leur chaise roulante, ou bien à aller seuls aux toilettes. On améliore ainsi l’autonomie des bénéficiaires en réduisant la fatigue physique du personnel aidant.

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    MARIONET-ASSIST, un robot parallèle à câbles, aide à transférer un individu (ici, un mannequin) de son fauteuil à son lit.
    © Inria / Photo H. Raguet

    Le robot n’est composé que d’éléments standards, ce qui en fait un système bon marché par rapport aux solutions actuelles de rails placés au plafond, autrement plus intrusifs. En outre, nous avons travaillé sur le problème de l’adaptation à l’environnement : où placer les treuils, dont la puissance est limitée, de façon à couvrir au mieux la pièce tout en assurant que l’on pourra soulever intégralement l’individu ? On tient également compte du fait que l’installateur n’est pas un expert et donc qu’il ne s’approchera qu’approximativement de la solution idéale. Ce problème peut se traduire mathématiquement et, avec un outil, l’analyse par intervalles, on peut calculer à partir de la géométrie de la pièce l’ensemble des placements possibles des treuils sous la forme de régions pour chacun. On donne ici à l’installateur une grande flexibilité tout en garantissant les performances voulues.

    Quand la flottille se déploie

    Dès lors, on peut imaginer un scénario réaliste d’une situation d’urgence où des aides techniques connectées réagissent ensemble. L’utilisateur, derrière le déambulateur ANG, se dirige vers la porte, trébuche et tombe. Grâce à ses instruments embarqués, l’appareil détecte une situation anormale sans être sûr qu’il s’agit bien d’une chute. Le déambulateur transmet simplement une alerte à l’ordinateur coordinateur qui demande à un robot aspirateur connecté, muni d’une caméra et téléopérable via le web, de se diriger vers le point où a eu lieu la probable chute. Là, l’engin vérifie avec son système de vision si le sujet est au sol. Quand c’est le cas, le robot Marionet-Assist vient alors se placer au-dessus de la personne afin de lui apporter son aide. Lorsque c’est insuffisant, le coordinateur alerte le voisinage tout en déverrouillant les accès à l’appartement. Faute de réaction, le coordinateur contacte un centre de secours et passe le contrôle du robot aspirateur au sauveteur qui peut alors échanger avec le sujet à terre.

    On peut pousser ce scénario un cran plus loin. Avec sa caméra, le robot aspirateur peut détecter un saignement abondant. Cette information est transmise au coordinateur qui active alors un second robot mobile dont la fonction est d’appliquer une compresse. Ces exemples montrent qu’une flottille d’aides techniques connectées est apte à gérer au mieux une situation compliquée en travaillant de conserve, de façon collaborative, tout en étant peu intrusive dans un mode normal.

    Sur tous les fronts !

    On peut toutefois relever un point faible dans ce scénario : la détection de la chute. Que se passe-t-il quand la personne n’est pas derrière le déambulateur ? Pour combler cette lacune, nous avons développé une veste instrumentée qui assure à la fois la détection de chute et un monitoring médical. L’apparition de nouveaux textiles techniques dotés de capteurs permet d’imaginer des vêtements qui mesureront des paramètres biologiques et détecteront diverses activités, notamment des situations anormales comme la chute.

    Dans un tout autre domaine, mentionnons l’utilisation thérapeutique d’un jouet robotique, le phoque Paro, qui exprime du contentement lorsqu’il est caressé. Placé dans des institutions accueillant des personnes souffrant de dépression ou de démence, ce jouet réduirait sensiblement leur agressivité en donnant aux personnes une motivation collective. Ainsi, la robotique jouera sans doute un rôle dans le bien-être des personnes fragiles et simplifiera par ailleurs la tâche du personnel aidant et de la communauté médicale. Des travaux scientifiques de longue haleine sont encore nécessaires, impliquant aussi les sciences humaines, par exemple pour travailler sur l’apparence et l’acceptation de ces dispositifs. De plus, la science s’intéresse ici à des problèmes de société, un domaine dont la dynamique est souvent très lente. La pénétration des solutions robotiques sera probablement progressive alors même que la technologie et la science pourraient provoquer une rupture.

    Ces aides techniques posent aussi des problèmes éthiques. Elles concernent des personnes fragiles, mais souvent à fort pouvoir d’achat, un entourage prêt à faire de gros sacrifices. Ce type de consommateurs éloigne les coûts pratiqués des réalités industrielles. En outre, des dispositifs sont potentiellement très intrusifs quant à la vie privée. D’autres problèmes sont d’ordre légal. En effet, les aides techniques ne seront jamais fiables à 100 %. Qui sera responsable en cas de dysfonctionnement ? L’arsenal juridique est muet à ce sujet. On le voit, l’arrivée des robots d’assistance se prépare sur de multiples fronts !

    • T. WANG et al., Walking analysis of young-elderly people by using an intelligent walker ANG, in Robotics and Autonomous Systems, prépublication en ligne, 2014.
    • J.-P. MERLET, The forward kinematics of cable-driven parallel robots with sagging cables. in 2nd Int. Conf. on cable-driven parallel robots (CableCon), pp. 3-16, Duisburg, 2014.
    • M. CARRICATO et J. P. MERLET, Stability analysis of underconstrained cable-driven parallel robots, in IEEE Trans. on Robotics, vol. 29, pp. 288–296, 2013.

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    Jean-Pierre Merlet

    Directeur de recherche Inria, responsable de l'équipe HEPHAISTOS.

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